Mai 2018 - Partage d'expériences et de connaissances des pays en matière de financement des risques de catastrophes

Le 15 mai 2018, plus de 60 participants ont assisté à un événement sur l'Initiative de financement des risques de catastrophes en Afrique (ADRF), qui a eu lieu en marge du forum Understanding Risk (UR) du 14 au 18 mai à Mexico. Parmi les participants figuraient 40 délégués de 14 gouvernements d'Afrique subsaharienne (Cap-Vert, Éthiopie, Ghana, Kenya, Lesotho, Madagascar, Malawi, Mozambique, Nigéria, Seychelles, Sierra Leone, Swaziland, Tanzanie et Ouganda). En outre, des représentants des Communautés économiques régionales (CER) africaines, notamment de la Communauté économique des États d'Afrique centrale (ECCAS), de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (ECOWAS), de l'Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) et de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), ainsi que la Banque Africaine de développement, l'Union africaine et la Banque mondiale / la Facilité mondiale pour la réduction des catastrophes et le relèvement (GFDRR). Cet événement a été le plus grand rassemblement de praticiens africains à ce jour, confirmant l'impact que l'Initiative ADRF a déjà eu sur le renforcement des capacités des gouvernements d'Afrique subsaharienne en matière de financement des risques de catastrophe.


L'objectif principal de l'événement était de rassembler des responsables gouvernementaux et des praticiens impliqués dans l'Initiative ADRF, et de leur permettre de partager leurs expériences, connaissances et leçons tirées des activités mises en œuvre dans le cadre de l'Initiative. L'événement était axé sur les thèmes de l'information sur les risques dans le cadre des programmes de gestion des risques de catastrophe et du financement des risques de catastrophe.


Parmi les principaux domaines d'activités développés dans le cadre de l'Initiative ADRF, l'importance de la collecte et de l'analyse des données a été soulignée par de nombreux participants, notamment Madagascar suite à son expérience avec Cyclone Enawo en 2017, et par les pays d'Afrique de l'Est. Ce sujet est crucial pour mieux comprendre les risques auxquels les pays sont confrontés, quelles zones géographiques sont sujettes aux catastrophes, et comment l'analyse peut être améliorée et accélérée en cas de catastrophe pour une réponse mieux coordonnée. Outre la sensibilisation aux risques de catastrophe et au changement climatique, les données sur les risques sont utilisées dans diverses activités, notamment pour aider les pays à évaluer les risques urbains, effectuer des analyses sectorielles spécifiques pour des infrastructures plus sûres et mener des évaluations rapides après une catastrophe. Les participants ont largement convenu que l'information sur les risques est une condition préalable fondamentale à l'élaboration de stratégies éclairées de financement des risques de catastrophe, et qu'elle peut alimenter les décisions des gouvernements pour le développement de mécanismes contingents et d'autres décisions de gestion des risques de catastrophe. Les délégués de divers pays subsahariens tels que le Kenya, la Tanzanie et Madagascar ont souligné que l'appropriation de la collecte et de la gestion des données est primordiale et ont insisté sur le fait que le renforcement des capacités des gouvernements était essentiel dans ce domaine.


Les programmes sociaux susceptibles d'être renforcés en cas de catastrophe se sont avérés efficaces pour atteindre les personnes les plus vulnérables en temps de crise. Au cours de la sécheresse de 2015, le programme de transfert d'argent du Kenya, le Hunger Safety Net Program, a aidé plus de 100 000 ménages sur une période de deux semaines. Une réponse rapide et inclusive exigeait un système de filet de sécurité opérationnel et flexible, en plus de structures gouvernementales coordonnées aux niveaux national et local. Au Kenya, des transferts d'argent rapides, en espèces, aux ménages vulnérables touchés par la sécheresse ont été possibles grâce à l'utilisation de données satellitaires pour déclencher l'extension du programme, à des règles claires et préétablies pour déclencher une réponse, à la pré-inscription de tous ménages dans les comtés couverts et la fourniture de comptes bancaires à tous les bénéficiaires potentiels. En Éthiopie, le programme de filet de sécurité productif (PSNP) a également été étendu pour répondre aux chocs liés aux catastrophes. La mise à l'échelle du PSNP est soutenue par un système d'alerte précoce et intègre des fonctionnalités innovantes pour augmenter automatiquement la protection sociale et recruter des bénéficiaires supplémentaires lorsque le pays connaît une crise alimentaire. Un délégué de l'Ouganda a également présenté le Fonds d'action sociale du nord de l'Ouganda (NUSAF) 3, qui fournit un soutien financier effectif pour renforcer la résilience d'environ 700 000 ménages pauvres et vulnérables grâce au renforcement des institutions et à la responsabilisation des services publics. Le projet NUSAF 3 comprend un volet de financement des risques de catastrophe, qui permet au dispositif d'étendre rapidement une aide financière aux ménages vulnérables en cas de sécheresse à Karamoja, la région la plus pauvre du pays. À ce jour, la composante de financement des risques de catastrophe a touché plus de 50 000 des ménages les plus pauvres (environ 250 000 personnes) en Ouganda, leur fournissant des revenus pendant la sécheresse El Niño de 2016 et 2017. Le public a également pu entendre l’expérience de plusieurs autres pays d’Afrique subsaharienne qui ont bénéficié d'une assistance technique pour développer des filets de sécurité sensibles aux chocs de l'Initiative ADRF, tels que le Lesotho et le Malawi.

 

L'Initiative ADRF a pour objectif principal de contribuer au développement des stratégies de financement des risques de catastrophe. Les participants ont partagé leurs expériences, qui ont suscité de vives discussions sur les étapes nécessaires à la mise en place des instruments et mécanismes de financement des risques de catastrophe, notamment la nécessité d'une coordination multisectorielle ou la mobilisation de fonds pour résoudre les situations d'urgence après une catastrophe. Un délégué du Mozambique a expliqué comment le pays a activé un mécanisme de réponse immédiate en 2016, a créé un fonds de gestion des risques de catastrophe en juillet 2017 pour financer la préparation, l'intervention, le relèvement et la reconstruction, et a récemment entamé des discussions sur le développement d’une assurance pour les risques souverains. En tant que l'un des pays les plus avancés de l'Afrique subsaharienne en la matière et le premier à avoir mis en place une stratégie de DRF, un délégué du Kenya a élaboré sur les instruments utilisés par gouvernement kenyan pour renforcer sa préparation financière aux catastrophes naturelles. Ceux-ci incluent le financement conditionnel et l'instrument Cat DDO d’option de tirage différé pour les risques liés aux catastrophes naturelles, qui sera soumis à l'approbation de la Banque mondiale en juin 2018. Ces exemples et les discussions qui ont suivi ont réitéré l'importance de développer des stratégies de financement des risques de catastrophe et de commencer des préparatifs ex ante aidant à gérer la pression financière sur les gouvernements suite à une catastrophe et leur permettant de démarrer rapidement le processus de relèvement.

 

Les interactions entre les pays africains lors de l'événement ADRF montrent clairement que l'évolution du programme de financement des risques de catastrophe dans chaque pays est très différente et dépendent des besoins du gouvernement, du contexte et du soutien politique apporté aux initiatives de ce type. Il était également clair que le renforcement des capacités dans le domaine du financement des risques de catastrophe en Afrique subsaharienne est un processus continu qui nécessitera un engagement ferme de la part des partenaires de développement au cours des années à venir. Les pays qui souhaitent s'engager sur ce sujet peuvent apprendre et même dépasser le succès initial des projets qui ont été mis en œuvre grâce au soutien de l'Initiative ADRF, montrant que de nouveaux progrès sont attendus. De plus, l'événement ADRF a aussi rappelé l'importance des activités de partage des connaissances. En tant que pionniers de d’initiatives de financement des risques de catastrophe dans leurs pays respectifs, les participants ont pu réfléchir, faire le point et emporter des messages importants et des bonnes pratiques à partager au sein de leur pays respectif.

 

L'initiative ADRF est l'un des cinq résultats du programme de coopération intra-ACP de l’Union européenne et des pays d’Afrique, des Caraïbes, et du Pacifique intitulé «Renforcer la résilience aux catastrophes en Afrique subsaharienne». Ce programme de coopération est mis en œuvre par plusieurs partenaires, dont la Banque africaine de développement (BAD), la Commission de l'Union africaine (CUA), La Stratégie internationale de prévention des catastrophes des Nations Unies (UNISDR), et La Facilité mondiale pour la réduction des catastrophes et le relèvement (GFDRR) gérée par la Banque mondiale (BM). L'objectif global du programme est de renforcer la résilience des régions, pays et communautés d'Afrique subsaharienne aux impacts des catastrophes naturelles, y compris à l'impact potentiel du changement climatique, pour réduire la pauvreté et promouvoir le développement durable. L'Initiative ADRF, lancée en 2015 et mise en œuvre par la GFDRR et la Banque mondiale, soutient le développement de stratégies de financement des risques aux niveaux régional, national et local pour aider les pays africains à prendre des décisions éclairées afin d'améliorer leur capacité de réponse financière et d'atténuer les impacts socioéconomiques, fiscaux et financiers des catastrophes.